Témoignage : Bouba, 16 ans

jeune homme africain adolescent

Bouba* a fui la pauvreté du Mali. Après la torture et la guerre en Lybie, il a enfin pu réaliser son rêve d’aller à l’école.

jeune homme africain adolescent

Je m’appelle Bouba*, j’ai 16 ans et je suis né au Mali. 

Je vivais avec mes parents, on était très pauvres. J’ai été en scolarisé en école coranique pendant 1 an avec mon frère jumeau. Par manque de moyens nous avons été obligés de stopper notre scolarité. 

Mon frère jumeau est tombé malade et nous n’avions pas d’argent pour le faire soigner et il est décédé à la maison.

Ensuite, j’ai appris la couture avec mon père, pour essayer d’aider ma famille. Mais c’était compliqué de gagner de l’argent en pratiquant ce métier. Puis, mon père est tombé lui aussi malade et nous n’avions pas les ressources financières pour le soigner, il est mort quelque temps après.

Avec ma mère, nous avons été obligés de retourner dans notre village d’origine. Je suis resté 1 an là-bas, mais il n’y avait pas de travail. 

Un jour, ma sœur, qui habitait Bamako, est venue me voir au village pour me proposer de partir en Europe parce que nous avions beaucoup de mal pour nous nourrir et nous étions complètement désespérés. Nous avons ensuite pris un car, puis un pick-up pour aller jusqu’en Algérie. Nous sommes restés 1 mois là-bas et nous étions hébergés dans un foyer qui était géré par un passeur.

La Lybie

Nous nous sommes par la suite rendus en Libye. Pour arriver dans ce pays, nous avons traverser le désert Algérien pendant 8 jours. J’ai été séparé avec ma sœur lors de la traversée pour rentrer en Libye, moi j’étais dans un pick-up, et elle, dans un camion. Il y a eu des coups de fusils et les deux convois ont été séparés. À ce moment-là, j’ai perdu sa trace. Une fois arrivé sur place, je me suis rendu compte que nous avions été vendus par les passeurs Algériens aux Libyens. 

Nous avons été envoyés dans un bâtiment désaffecté et nous étions très nombreux. Nous avons été obligés de nous déshabiller intégralement pour pouvoir nous fouiller et j’ai vu un Monsieur dans un coin qui pleurait et je me suis rendu compte qu’il avait reçu une balle dans le pied. Je me suis mis à pleurer moi aussi car je voyais des gens en sang se faire torturer donc j’étais affolé et je ne savais pas quoi faire. Nous étions 25 personnes dans des dortoirs de 15 m2. Nous étions très serrés, quasiment les uns sur les autres.

Ensuite il m’a enchaîné et pendu par les pieds.

Un jour, vers 4h du matin, je me suis levé pour aller faire mes besoins. Le surveillant à pensé que je voulais m’enfuir. Il a donc réveillé tout le monde pour demander “qui voulait s’enfuir ?? !!”. Je me suis manifesté en lui disant que je voulais juste faire mes besoins et pas m’enfuir. Il ne m’a pas cru. Il a commencé à me frapper avec un tuyau rigide de chantier et m’a ensuite enchaîné et pendu par les pieds. J’avais peur et j’ai beaucoup pleuré. J’ai quasiment perdu connaissance.  

On m’a ensuite mis en prison 3 mois. Il avait la guerre en Lybie et un groupe armé est venu détruire la prison. J’ai donc pu fuir grâce à une personne qui a appelé son passeur pour nous envoyer un taxi. J’ai ensuite pu retrouver ma sœur qui était à Tripoli.

Après quelques jours passés la bas, le passeur est venu nous récupérer pour nous amener sur le lieu d’embarcation. Il y avait 3 zodiacs et ma sœur n’était pas dans le même que le mien. Chaque zodiac a pris une direction différente. Mon embarcation a été secourue par SOS Méditerranée. Malheureusement ma sœur n’a pas eu cette chance. Son zodiac a été intercepté par des marins Lybiens pour retourner dans ce pays. 

L’Europe

Je suis ensuite arrivé en Italie et je n’arrivais pas à comprendre ce qu’on me disait. Du coup j’ai décidé de tenter ma chance en France. J’ai pris le train jusqu’à Avignon, je suis allé au Conseil Départemental et ils m’ont demandé de raconter mon parcours. Ils m’ont dit qu’ils allaient me prendre en charge, j’avais mal à un bras et ont dit qu’ils allaient me soigner. Je suis resté un mois à l’hôtel sous médicament. 

On m’a ensuite transféré à Toulon et là-bas, il n’y avait pas de place pour moi à l’école, et je voulais absolument y aller. 

Je suis du coup retourné à Avignon et j’ai été recueilli chez Rosmerta qui a réussi à me faire scolariser.

*par souci de confidentialité, le prénom et la photo ont été modifiés.